Spécialiste des voyages sur mesure : un sale boulot de rêve !

Ici à l’agence, chacun maîtrise sa ou ses destination(s). En fonction des pays sur lesquels nous travaillons, la charge de travail varie avec la saisonnalité. Comme la plupart de mes collègues, je reçois une grande majorité de mes demandes entre novembre et mars. Une fois cette « haute saison » passée, les beaux jours reviennent et nous pouvons à nouveau respirer et regarder le ciel. Les mois de travail qui suivent la « haute saison » sont pour nous plus physiques et se situent bien loin de nos écrans de la rue d’Hauteville. Nous adoptons alors une tenue plus sportive, déguisés en businessmen reporters en partance pour la Malaisie, l’Inde, l’Argentine ou la Namibie…

Au quotidien, notre « dur » labeur consiste à concevoir des voyages sur mesure, à travailler en étroite collaboration avec des prestataires du monde entier et à aider nos voyageurs à concrétiser leur projet d’évasion lointaine.
Bien souvent, notre bureau ne se trouve pas dans nos locaux parisiens mais plutôt à l’autre bout de la planète, dans des contrées un peu plus exotiques. Nous voyageons doublement à travers notre métier : une première fois par le biais de nos voyageurs et de la relation que nous entretenons avant et après leur voyage, et le reste du temps de nous-même lors de ce que nous appelons, dans notre jargon, les « éduc’tours » ou voyages de repérage.

Dès le début du mois d’avril, nos prestataires étrangers nous transmettent des invitations pour les futurs voyages de repérage. Ils s’étalent le plus souvent de mars à juin puis en septembre/octobre, période à laquelle l’équipe se réveille à chaque (rare) coup de téléphone.
C’est précisément à ce moment de l’année que nos effectifs diminuent considérablement. En passage éclair, car éparpillés entre Le Cap, Tokyo et Buenos Aires, nous ne croisons alors plus que les ombres de nos collègues, une ou deux fois par mois tout au plus ! Ce train de vie infernal auquel nous sommes accros est caractéristique de chacun d’entre nous.
C’est aussi parce que nous voulons continuellement enrichir notre expertise que nous acceptons la dure tâche de partir régulièrement explorer le monde et ce terrible et constant sentiment de sacrifice. Deux exemples récents très révélateurs de notre petite équipe d’explorateurs :

Christiane : notre spécialiste des voyages sur-mesure dans le sous-continent indien et au Japon a rejoint notre équipe il y a 8 mois de cela. Depuis son arrivée, Christiane n’a malheureusement pas eu la chance de profiter de nos bureaux chaleureux et de la météo hivernale de notre capitale. Il faut dire qu’après seulement 2 semaines d’ancienneté, Christiane était déjà invitée en Inde au fil des canaux salés de Cochin, au Kerala.
Six mois plus tard, elle s’envolait à nouveau vers cette région pour explorer Calcutta et les rives sauvages du Bengale après une découverte très physique du Royaume du Bhoutan. Christiane est aujourd’hui rentrée de son deuxième voyage il y a moins de 30 jours. Pour avoir sagement patienté tout ce temps, elle a pu repartir en Inde, cette fois-ci sur la route des épices à l’extrême sud du pays. Trois voyages en Inde en moins de 8 mois, à votre avis, qui fait mieux ?

Photo Chris

Laure : notre spécialiste des voyages et safari sur-mesure en Afrique australe est à plaindre elle aussi (la pauvre, je crains le surmenage !) : cette année, elle est partie en famille à Zanzibar en février, a participé à un salon du tourisme en Afrique du Sud – d’où elle a fait un petit saut aux chutes Victoria (côté Zimbabwe) et dans le delta de l’Okavango au Botswana.
Trois semaines après son retour, à peine a-t-elle eu le temps de défaire sa valise et de se remettre de ses émotions qu’elle repartait en voyage en Afrique, cette fois-ci dans les parcs mythiques de Tanzanie, au cœur du Tarangire et du Serengeti. Avec trois déplacements en Afrique ces 5 derniers mois, Laure décrocherait sans doute le trophée du siège vacant de la rue d’Hauteville.

laure TZA

Les exemples se multiplient et, croyez-moi, aucun de mes collègues ne fait exception à la règle. Je pourrais encore évoquer les situations rocambolesques de « rotations expresses » au sein de notre équipe : d’un côté mes collègues Laure et Clothilde, l’une rentrait d’Afrique ce mois-ci pour laisser partir son binôme le même jour en repérage aux Philippines ; d’un autre côté ma collègue Nor et moi-même, Nor s’envolait pour Kuala Lumpur le lendemain de mon retour de voyage à Bornéo… Heureusement que mon avion n’était pas en retard, j’aurais manqué l’opportunité de lui souhaiter « bon voyage » à son tour.

Alors en quoi consistent ces fameux voyages professionnels et sont-ils réellement nécessaires ? La maîtrise d’un pays et de ce qu’il peut offrir à tous nos voyageurs est un métier à part entière. C’est d’ailleurs une formation continue, une malédiction à vie (vous nous plaignez, hein ?!), qui se répète sans fin.

Il faut constamment se mettre à jour concernant les nouveaux hébergements, se rendre auprès des hôtels de charme que nous affectionnons pour juger de l’évolution de leur service et de la qualité des prestations : il est impératif de tester la qualité des hamacs et la température des jacuzzis de votre future villa de luxe sous les tropiques, et mettre notre vie en péril en se jetant à l’eau (pour pousser la barque !) pour partir vivre les excursions et activités que nous proposons à nos voyageurs, pour toujours répondre au plus près de leurs attentes.

Nous enfilons notre tenue de businessman reporter, cartes de visite en poche, shorts ou moufles (en fonction des destinations et de la saison) dans le sac à dos et appareil photo constamment à la main prêt à capturer chaque détail du voyage.

En éduc’tour, nous testons pour vous le confort et la sécurité des prestations. C’est ainsi que nous savons si les bungalows sur pilotis au bord du lagon cristallin correspondent à vos attentes, ou encore si les plus fragiles et sensibles d’entre vous peuvent explorer certains endroits plus difficilement accessibles. C’est grâce à ces mêmes expériences personnelles sur le terrain que nos voyageurs partent l’esprit libre et que nous restons crédibles à leurs yeux.

Je ne voudrais pas me plaindre (loin de moi cette idée), mais la plus grande partie de mon dernier voyage à Bornéo ne fut pas de tout repos : il aura fallu de l’endurance pour suivre le rythme de randonnée sous l’humidité étouffante de la région de Batang Ai ; du courage pour explorer à la lumière d’une minuscule lampe torche frontale les grottes obscures de Niah où vivent de biens étranges bêtes ; une peau bien protégée contre les moustiques et les UV du Sabah et du Sarawak ; un estomac de plomb pour apprécier la cuisine locale très épicée ; une volonté de fer pour enchaîner les vols et les visites d’hôtels, les uns après les autres…

mattborneo

Mais quatre jours après mon retour de Bornéo, le teint encore fraîchement hâlé et la montre toujours réglée sur le fuseau horaire de Kuala Lumpur, j’écris ces quelques lignes en repensant à ces dernières semaines. Je me dis que nous avons en effet un bien sale boulot et que nous ne lâcherions notre poste pour rien au monde. Je m’arrête ici, je n’ai plus de temps à perdre, il me faut plancher à nouveau sur mon prochain départ à destination de la Malaisie… je n’ai que deux mois pour ça !