Back to Malaysia

J’avais l’impression que les centaines de passagers qui attendaient avec moi en salle d’embarquement me regardaient sans comprendre pourquoi je souriais aux anges. Ce sourire cachait en fait une excitation. Je m’imaginais déjà régner sur les animaux sauvages des forêts luxuriantes de Bornéo: les singes nasiques, les orangs-outangs, les tigres, les éléphants… mais j’arrête tout de suite de rêver : l’embarquement commence.

Comme il faut bien nous occuper à bord, on nous sert à déjeuner. Quelle surprise en découvrant le choix impressionnant de spécialités malaisiennes : nasi lemak, mee goreng, roti canai. J’en ai l’eau à la bouche. L’odeur et le goût me rappellent mon enfance. Je revois alors Maman cuisiner le roti canai, cette crêpe légère et croustillante faite de farine de froment et cuite sur une grille. Après le dessert, on nous propose une boisson chaude. J’opte pour un thé tarik (avec du lait mousseux).

Changement d’appareil à l’aéroport de Kuala Lumpur pour rejoindre Sarawak, le paradis des aventuriers « écolo-nature ». Par le hublot, j’aperçois des rivières marécageuses, une forêt impressionnante, des montagnes à pertes de vue… Ca y est ; je suis arrivée au minuscule aéroport de Kuching, prête à jouer « Indiana Jones ». Il fait très chaud, c’est humide. Je dois avoir l’air épuisée… je regarde ma montre et m’aperçois que j’ai oublié de la régler à l’heure malaisienne. Je demande l’heure exacte à un passant qui me regarde avec une drôle de tête : malgré mon air épuisé, il me répond qu’il est à peine 10h du matin…

J’ai 5 jours pour découvrir la région de Kuching. Je reste raisonnable pour la première journée et décide de me reposer à l’hôtel puis de sillonner à pied le centre ville. Dans des boutiques de style traditionnel, j’achète le célèbre poivre de Kuching, des objets fait à la main, des antiquités, des nids d’oiseaux et des produits exotiques de la forêt.

J’ai entendu dire qu’il existait encore d’anciens coupeurs de tête dans la région. La légende est elle vraie ? Je ne l’espère pas… Mais pour le savoir, je me rends courageusement avec un petit groupe dans la région de Batang Ai, à 4 heures de route et de bateau de Kuching. C’est incroyable ! On est loin de tout, totalement coupés du monde. L’atmosphère est calme et paisible. Les seuls bruits qu’on entend sont les bruits lointains d’un moteur de bateau, des chutes d’eau et des cris des calaos…

Notre hôtel, l’Hilton Batang Ai respecte parfaitement l’environnement : des chambres construites dans le concept des maisons longues (longhouses), meublées tout en bois, décorées à l’ethnique puis. Lorsque le soleil se couche, changement de décor : le froid remonte dans les couloirs, des brumes apparaissent autour de l’hôtel, plus de cris d’oiseaux. Un silence de mort… mystérieux et fascinant. Plus tard dans la soirée, j’apprends que l’hôtel est construit sur un ancien cimetière des coupeurs de tête ! Cet endroit me fait froid dans le dos.

Notre guide nous annonce les activités qui nous attendent : balades en pirogue sur la rivière de Batang Ai, trekking dans la jungle tropicale et rencontre avec les tribus d’indigènes. On nous fait parcourir une bonne dizaine de kilomètres dans cette jungle luxuriante. Je n’ai jamais vu autant d’arbres et de plantes immenses ! Nos chemins sont parsemés de lianes, de terres et d’insectes. Il y a tellement de végétation autour de moi que pour me frayer un chemin, j’aurais pu utiliser un sabre ! Après quelques heures de marche, on découvre une population, celle des Ibans habitant encore dans leur longhouse. Ils étaient au courant de notre visite car à notre arrivée, les villageois nous accueillent en costumes traditionnels. Ils commencent à taper sur des tambours, chanter et danser autour de nous. Cela ressemble à une techno parade version ancestrale. J’essaie de rester le plus discret possible pour ne pas laisser échapper un fou rire. Mais le guide m’a vue… j’ai un peu honte. Il m’explique que c’est un rituel pour ne pas entendre les cris d’oiseaux au moment de l’arrivée des touristes car cela porte malheur à la tribu. Dans la longhouse, le chef de la tribu va nous recevoir. On nous sert une boisson alcoolisée à base de riz. Je suis impatiente, je vais enfin rencontrer un descendant d’un coupeur de tête. Et là quel étonnement ! Je m’attendais à faire face à quelqu’un de très imposant. Au contraire, c’était un homme de petite taille, assez âgé mais encore musclé. Son corps est couvert de tatouages. Il nous explique que plus un homme a des tatouages, plus son range est élevé dans la tribu. Il nous raconte dans un dialecte la vie quotidienne des Ibans. Le guide traduit ses paroles. Les Ibans se nourrissent des fruits de la région, chassent les animaux avec leurs arcs et leurs sarbacanes ou pêchent avec leurs lances.

La Malaisie est vraiment surprenante. D’un côté des tribus d’indigènes vivant en autarcie, ailleurs, à Kuala Lumpur, la capitale est une ville futuriste. Ce voyage est une occasion se s’apercevoir qu’il n’existe pas que des centres thermaux pour se ressourcer : aller à la rencontre des autres populations est aussi un moyen de se retrouver.